PAR : Pierre Osselaer
Ancien, Communauté chrétienne de Stockel, Bruxelles

Article paru dans :
Rubrique :
À Bible ouverte
Mots-clés :

Dans votre Bible : Psaume 121

Êtes-vous un disciple de Jésus ? Si la réponse est oui, alors vous êtes un pèlerin en chemin vers la maison du Père. Si la réponse est oui, vous êtes aussi un étranger sur la terre, citoyen d’une patrie céleste vers laquelle vous faites route (cf. Hé 11.13 ; 1P 1.1 ; 2.11).

randonneurs

Souvenez-vous de cette très belle prière de Jésus pour les siens en Jean 17 : « Je ne suis pas du monde » (v. 14, 16), mais toi Père « tu m’as envoyé dans le monde » (v. 18). De la même manière, dit-il à propos de ses disciples : « Ils ne sont pas du monde » (v. 14,16), mais ils y résident encore car « moi je les ai envoyés dans le monde » (v. 18).

Nous venons de Dieu qui nous a donné la vie et nous retournons à notre Créateur. Notre temps sur la terre est infiniment bref au regard de l’éternité. Évidemment ces affirmations ne me viennent pas toujours à l’esprit quand je me débats avec mes soucis quotidiens. Il est donc bien utile d’avoir dans un coin de sa tête un tel psaume. Dieu nous gardera en chemin.

Les Psaumes des Montées

Le psaume 121 est le deuxième d’une série de quinze. Elle démarre au psaume 120 et se termine au psaume 134.

On les appelle « psaumes des montées » car ils étaient chantés par les pèlerins juifs qui, de tous les coins de Palestine et au-delà, venaient en pèlerinage au temple et montaient vers les hauteurs de Sion, la colline où fut fondée Jérusalem et, surtout, cherchaient à faire « monter » leur esprit pour se présenter devant Dieu dans le sanctuaire construit par Salomon.

Chacun de ces quinze psaumes marque une étape d’un chemin plein d’enseignement pour nous. Ces pèlerinages étaient fréquents dans la vie d’Israël. En effet, trois fois par an, les Hébreux interrompaient leurs activités quotidiennes pour marcher vers Jérusalem et se présenter devant Dieu.

Le premier pèlerinage avait lieu pour Pessah, la Pâque puis la fête des Pains sans levain, au printemps. On commémorait alors la libération de l’esclavage en Égypte. Puis venait Chavouoth, la Pentecôte, fête de la moisson, au début de l’été. Les prémices de la moisson et les premiers fruits de la terre étaient présentés à Dieu. Finalement, Souccoth, la fête des tentes, à l’automne, marquait la fin des récoltes. On retrouve l’institution de ces fêtes en Exode 23.14-17 ; 34.22-24 et Lévitique 23.

Se lancer dans le pèlerinage

Dans un pèlerinage, il y a toujours un premier pas, une décision. Le premier pas que tout homme se doit de réaliser avec Dieu, nous le trouvons dans le psaume 120 : « Cantique pour la route vers la demeure de l'Éternel. Dans ma détresse, j'ai fait appel à l'Éternel, et il m'a répondu. Ô Éternel, délivre-moi des lèvres fausses, des langues mensongères ! » (Ps 120.1-2).

air libre au bord d'un lac

Le premier pas du pèlerinage avec Dieu consiste à fuir tous les mensonges et nous revêtir de la vérité de Dieu… Pour nous qui avons reçu la révélation du Nouveau Testament, il s’agit de revêtir Christ (Ga 3.27), la Parole de Dieu incarnée (Jn 1.14), la Vérité qui mène à Dieu (Jn 14.6).

Le Psaume 120 dépeint un mélange de situations confuses : détresse, mensonges, malheurs et guerres. Une série de fardeaux que nous devons déposer. Il paraît que les personnes qui s’engagent pour la première fois, dans une randonnée de plusieurs jours commettent toutes la même erreur : leur sac à dos est trop lourd car ils emportent bien des choses inutiles. Alors, au fil des heures, ils se délestent petit à petit.

La vie chrétienne commence toujours par cette disposition de cœur du psaume 120 à nous délester de tout mensonge, de la haine ; à reconnaître que nous sommes pécheurs ; à demander à Dieu de nous pardonner, de nous revêtir de sa vérité et de sa paix.

Le psaume 121 pour la route

Alors nous pourrons nous présenter devant le psaume 121, que le pasteur Eugène Peterson appelle « Le Bureau d’accueil du Pèlerin(*) ». Je vous invite à le relire avant de le méditer.

1 Je lève les yeux vers les monts : d’où le secours me viendra-t-il ?   
2 Mon secours vient de l’Éternel qui a fait le ciel et la terre.   
3 Il te gardera des faux pas, celui qui te protège ne sommeillera pas.   
4 Non, jamais il ne dort, jamais il ne sommeille, celui qui protège Israël.   
5 L’Éternel est ton protecteur, l’Éternel est à ton côté comme une ombre qui te
protège.   
6 Le soleil ne te frappera donc pas le jour, ni la lune pendant la nuit   
7 L’Éternel te gardera de tout mal : il gardera ta vie.   
8 L’Éternel veillera sur toi pendant tes allées et venues, dès maintenant et à jamais. 

Dans ce psaume je relève d’emblée trois dangers de la marche : les faux pas, le soleil durant le jour et la lune durant la nuit. Face à cela, un seul protecteur s’impose : l’Éternel, dont le nom n’apparaît pas moins de cinq fois dans le texte.

Je lève les yeux vers les monts (v. 1)

femme assise sur un sommet rocheux, contemplative

J’espère que vous avez déjà eu ce privilège de faire silence devant un beau paysage de montagne. C’est grandiose, plein de majesté et de force. Nous y voyons un signe de fermeté, de solidité. Nous éprouvons ce sentiment de nous rapprocher un peu de Dieu. Telle est notre vision de chrétiens européens du siècle présent.

Pour les Israélites, la symbolique pouvait être très différente car les montagnes étaient des lieux considérés comme sacrés, habités par quantité d’esprits et de dieux de peuples idolâtres… On y pratiquait toutes sortes de cultes et de sacrifices, y compris humains… Et le peuple de Dieu, hélas, s’est souvent laissé séduire par ces cultes sur les « hauts-lieux ».

Voici ce qu’en dit Jérémie : « Une clameur se fait entendre sur les hauteurs, les pleurs des enfants d’Israël demandant grâce, parce qu’ils ont faussé leur voie, oublié l’Éternel leur Dieu. Revenez, fils infidèles, je guérirai vos infidélités ! Voici, nous venons à toi parce que tu es l’Éternel notre Dieu. Oui, c’est en vain que vient des hauteurs le tumulte des fêtes sur les montagnes. Oui, c’est en l’Éternel notre Dieu qu’est le salut d’Israël. » (Jr 3.21-23).

Moi aussi j’ai besoin de me souvenir que c’est de Dieu seul et non de mes faux dieux que vient le secours. L’Ecclésiaste parle de trouver le secours dans les plaisirs, les grands projets, les études, le travail, la réussite mais il arrive à cette conclusion : sans Dieu tout est dérisoire et poursuite du vent.

Mon secours vient de l’Éternel qui a fait le ciel et la terre (v. 2)

Nous avons là une affirmation puissante du pèlerin qui quitte la maison ! Elle me rappelle Ecclésiaste 5.1b : « Dieu est au ciel et toi sur la terre. »

Lorsque nous nous rassemblons le dimanche, nous proclamons la grandeur de Dieu et nous nous souvenons, par exemple, qu’il a créé la terre et les cieux. Nous démarrons notre semaine en Église, bien conscients de la présence et de la puissance de Dieu. Puis, dans la semaine, nous évitons de le déranger et essayons de bricoler nous-même nos petites solutions. Jésus n’a pas dit : « Je suis avec vous chaque dimanche. » Il a dit : « je suis avec vous tous les jours. » (Mt 28.20).

Oui, Jésus a la première place dans ma vie. Le dimanche en tout cas. En revanche, du lundi au samedi, c’est souvent moi qui occupe cette première place. Pourtant, nous savons, comme nous le lisons au début de l’Évangile de Jean, que rien de ce qui a été fait n’a été fait sans lui (Jn 1.3). Jésus lui-même l’affirme dans ce même Évangile : « Sans moi vous ne pouvez rien faire ! » (Jn 15.5).

Que notre Dieu nous aide à prendre conscience de sa grandeur. Alors nous lui rendrons la première place et nous reprendrons celle qui nous revient tous les jours de la semaine. « Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel… » (Mt 6.9-10).

Il te gardera des faux pas (v. 3-4)

Avec le passage de la première à la deuxième personne du singulier au v. 3, nous pourrions imaginer que le psalmiste se laisse comme rassurer par les paroles d’un ami qui reste à la maison.

homme venant au secours de sa femme blessée

Nous aimerions que la vie chrétienne soit un long fleuve tranquille parsemé de réussites. Hélas, ce n’est pas toujours le cas. Nous marchons souvent dans un désert aride. Il nous arrive de trébucher sur une pierre et de nous tordre la cheville. Nous perdons l’équilibre et voilà que nous chutons. Parfois nous perdons de vue le chemin et nous nous égarons sur la route. Dieu n’est pas un juge autoritaire qui observe les choses de loin. Il est un compagnon de route qui nous accompagne.

Jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, j’ai plutôt suivi la trace de mes parents chrétiens… puis j’ai tout envoyé promener. J’ai gardé la foi, mais je ne voulais plus entendre parler de m’investir dans l’Église. J’ai donc quitté le mode pèlerin pour passer en mode touriste. J’allais de temps en temps à l’Église ici ou là. Puis je suis passé du mode touriste au mode chrétien tout seul, pensant que je n’avais pas besoin d’Église.

Comme je me trompais ! Nous avons besoin les uns des autres. Merci au Seigneur qui m’a ramené de ce faux pas. Il a travaillé plus de dix ans pour cela ! Il m’a beaucoup pardonné ! À vingt-cinq ans, il me manquait une qualité essentielle : la persévérance dans les difficultés. Néanmoins Dieu, lui, persévère toujours et ne vous lâche pas. Il ne s’éloigne pas.

Quel encouragement je vois là pour les parents dont les enfants se sont peut-être éloignés pour un temps. Dieu ne sommeille pas et ne les abandonne pas.

L’Éternel, mon ombre protectrice (v. 5-6)

coup de soleil

Pour l’Israélite en route, la journée sous le soleil pouvait être torride et la nuit froide et dangereuse. Tout au long de l’histoire du peuple d’Israël de l’ancienne Alliance jusqu’à aujourd’hui, dans les beaux comme dans les mauvais jours et malgré des infidélités répétées, Dieu a veillé sur lui et l’a protégé. Ce qui est vrai pour Israël est aussi vrai pour l’Église et, au-delà, pour chaque chrétien…

Que pourrait bien signifier le soleil pour nous aujourd’hui ? Si nous passons une journée en plein soleil, nous risquons l’insolation, fiévreux et affaiblis pour plusieurs jours. C’est aussi un risque qui, me semble-t-il, menace notre vie chrétienne, individuelle et collective, avec son accumulation d’obligations et d’activités parce que, bien sûr, nous voulons servir Dieu et que les besoins sont nombreux… Même si tout cela est vrai nous devons toujours nous souvenir que Dieu a posé des limites. Il ne nous a pas accordé tous les dons et nous ne savons pas tout faire. Il a fixé des bornes à nos capacités physiques et il a prévu pour nous des temps de repos.

Que pourrait bien évoquer la lune ? Probablement bien des choses, mais vous l’avez peut-être expérimenté lors de vos vacances : si vous passez la journée en plein soleil, même si vous n’allez pas jusque l’insolation, la nuit suivante est agitée et pleine d’insomnies. C’est aussi le cas dans notre vie personnelle : si nous sommes en surrégime pendant la journée, nous sommes gagnés par l’anxiété durant la nuit.

Quelles sont les solutions ? Travailler, avancer en respectant nos dons et nos limites car c’est Dieu qui nous les fixe ; nous souvenir que Dieu a placé dans son Église, peut-être juste à côté de nous, des frères et des sœurs qui pourraient nous être complémentaires.

Souvenez-vous de l’exemple d’Élie, ce grand prophète qui n’en pouvait plus : « Regarde Éternel je suis resté tout seul… » (cf. 1R 19.10,14). Il n’avait pas une vue complète sur le travail de Dieu : « Élie, j’ai sept mille hommes en réserve qui ne m’ont pas abandonné […] et j’ai même prévu pour toi un compagnon de travail […] voici Elisée… » (cf. 1R 19.15-18).

Oui, mes amis, « L’Éternel est à nos côtés ». Il n’a pas vraiment besoin de nous, mais, dans sa grâce, il veut que nous soyons ses collaborateurs parce qu’il nous aime et nous veut à ses côtés. Il nous invite à faire ce qui est possible, lui se charge de l’impossible. Même quand nous dormons la nuit, lui continue le travail.

L’Éternel te gardera de tout mal (v. 7-8)

L’Éternel veille sur les allées et venues du pèlerin. Sur tout le chemin, son Dieu le gardera du mal ! Nous pourrions littéralement traduire par « l’Éternel veillera sur ta sortie et ton entrée ». La sortie désigne naturellement ici le départ des pèlerins de la maison familiale et l’entrée, l’arrivée à Jérusalem.

Cependant, ces versets revêtent un sens plus large pour s’étendre à l’existence entière, à la fin du v. 8 : « dès maintenant et à jamais ». C’est en tout temps que l’Éternel veille sur les allées et venues de ceux qui marchent vers sa demeure. À notre tour, nous pouvons nous approprier ces paroles et recevoir pour nous aussi ces mots par lesquels Jésus intercède pour ses disciples : « Je ne te prie pas de les ôter du monde, mais de les préserver du mal. Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Sanctifie-les par ta vérité : ta parole est la vérité. Comme tu m'as envoyé dans le monde, je les ai aussi envoyés dans le monde ». (Jean 15.15-18)

Oui, notre Dieu est celui qui nous gardera du mal, qui veillera sur notre route dans ce monde. À notre tour nous pouvons nous confier en lui, comme notre Seigneur nous y conduit à la fin du Notre Père : « Ne nous laisse pas entrer en tentation mais délivre-nous du mal. Car c’est à toi qu’appartiennent le règne la puissance et la gloire au siècle de siècle » (Mt 6.13).

Jésus, comme il le fit lui-même, nous invite à toujours tourner nos regards vers Dieu. C’est lui qui nous accompagne sur la route et nous protège en chemin aujourd’hui. C’est lui qui nous accueillera un jour, à la fin de notre pèlerinage, dans sa Jérusalem céleste, comme les fils et filles bien-aimés qu’il attend impatiemment de retrouver. Amen ! ■


  • Eugène Peterson, Méditations sur les psaumes des montées (Farel, 2011).
Article paru dans :

août 2020

Rubrique :
À Bible ouverte
Mots-clés :
Point de vue

Chère liberté

Thierry Huser
Article précédent
Églises

L'Église protestante baptiste de Lagny-sur-Marne

Ruben Andriafehivolarisoa
Article suivant
Article paru dans :