PAR : Cédric Jung
Membre du conseil de l’Association baptiste, pasteur, Église évangélique baptiste La Chapelle, Court

Article paru dans :

Dans votre Bible : Jean 21.1-14

Peut-être avez-vous déjà vécu l'attente d'un lever de soleil. Il y a quelques années, mon épouse et moi avons voulu expérimenter cela pendant nos vacances. Mal renseignés sur l'heure exacte, nous sommes partis à 3h30 pour nous rendre au bord de la mer. Et là, nous avons avancé en tâtonnant vers un endroit d’où nous pourrions observer le soleil poindre à l'horizon. C'était au moins une heure trop tôt ! Des rochers, un sentier pas vraiment délimité… Nous avions du mal à voir où nous allions.

lever de soleil

Finalement, l'aube arrive ; ce halo de lumière annonçant le lever du soleil. Le décor commence alors déjà à changer. Puis enfin, magnifique, l’éclat du soleil transperce l'horizon. Et tandis qu’il s’élève, les endroits que nous avions essayé d’explorer dans la nuit noire quelques temps plus tôt semblent transformés. « C'est par là qu'on est passés ! » Tout paraît plus facile, quand on est dans la lumière !

L’épisode raconté dans Jean 21.1-14 nous plonge aussi dans cette transformation du paysage. Il se compose de trois parties : la nuit (v. 1-3), l'aube (v. 4-8) et le petit jour (v. 9-14). Le point d'articulation du texte se situe… à l'aube. Tout semble opposer la nuit et le jour.

L’errance dans la nuit (v. 1-3).

Très symboliquement, tout commence la nuit. Les disciples sont à terre, au bord du lac. Des onze, quatre sont absents. On trouve là Pierre, Thomas, Nathanaël, Jacques, Jean, et deux autres ; peut-être Philippe et André, originaires de la même région.

Thomas est cité juste après Pierre, en deuxième position. Celui qui n’avait pu croire sans voir (Jn 20.24-29) prend de l'assurance et Jean lui laisse une place d'honneur dans son récit. Pierre est mentionné en premier et nous savons que le dernier contact entre Jésus et lui dans les Évangiles a eu lieu au moment de sa trahison : le regard de Jésus, les pleurs de Pierre… (Lc 22.60-62).

pensif au bord de la mer

Ce Pierre, avec son groupe d'amis, est désœuvré. « Allez dire à mes frères de se rendre en Galilée : c'est là qu'ils me verront. » (Mt 28.7,10). Peut-être en a-t-il assez d'attendre. Sans Jésus, il ne sait plus quoi faire. Il va pêcher. Et les six autres, dans le même état d’esprit l'accompagnent.

Retour à la vie normale. Après leur expérience merveilleuse avec Jésus, va-t-il recommencer comme avant ? Les disciples cherchent, en tâtonnant, que faire de mieux en l'absence de Jésus. Ils vont de la terre ferme à la mer, sur un bateau.

Le symbolisme de la nuit continue : c’est l’échec, on travaille pour rien. Aucun poisson ! Les disciples errent sur la mer, sans rien prendre (v. 3). Et pourtant, c’est leur métier. Ils doivent bien connaitre les coins à poissons dans ce lac de Galilée si familier. Nous imaginons un peu l'ambiance : toute la nuit, sans réelle motivation. Peut-être peu de paroles échangées, on s'ennuie un peu.

L'aube charnière (v. 4-8).

« C’était déjà le matin. » La venue de Jésus, la lumière du monde, coïncide avec la lumière du jour.

Il n'est d'abord pas reconnu. Aujourd’hui aussi, Jésus est parfois tout proche de nous mais nous avons du mal à le reconnaitre ! Parfois même, nous faisons appel à lui mais nous ne reconnaissons pas sa voix. Nous sommes un peu comme Marie de Magdala au tombeau (Jn 20.14-18).

Il leur donne un ordre : « Jetez le filet du côté droit de la barque ! » (v. 6). Et les choses s'enchainent rapidement. Un miracle se produit. Les réactions des disciples sont diverses.

Jean, le disciple que Jésus aimait, reconnait son Seigneur. Il le souffle immédiatement à Pierre. Quand, le matin de Pâques, ils avaient appris que le corps de Jésus n'était plus là, ils avaient couru tous les deux vers le tombeau. Jean courait alors plus vite (Jn 20.3-10). Peut-être était-il moins bon à la nage ? Quoi qu’il en soit, il reste sur le bateau avec les autres disciples. Il faut bien s'occuper de ce filet énorme et ramener la barque à terre. Ils gardent les pieds sur terre si l'on peut dire.

Pierre, le plus fougueux, veut peut-être aussi se racheter de son terrible reniement. Il fonce. Cette fois-ci il ne va pas marcher sur l'eau et rejoindre Jésus sur la mer mais nager et le retrouver sur la grève. Et quand Jésus demandera de chercher des poissons dans le filet, il sera aussi le premier à courir vers le bateau.

Le jour s’est levé (v. 9-14).

La nuit fait place au jour ; le calme à l'excitation ; le filet vide au filet rempli ; l'inconnu sur le rivage au Sauveur reconnu ; l'errance sur les eaux du lac au retour précipité sur la terre ferme. Le mouvement s'inverse. On revient de la mer à la terre.

Jésus ne condamne personne. Ni les impatients, ni les précautionneux. Il a souhaité apparaitre à ses disciples réunis, même s'ils n'étaient pas au complet. Réunis, pour qu'ils vivent la même chose et pour que l'attestation du Jésus ressuscité soit plus forte encore.

C’est la troisième fois que Jésus se présente à ses disciples rassemblés. Ce sera sans doute la dernière. Il se manifeste, non par un festin mais par un simple repas. Il leur montre aussi que son corps peut bien manger et boire et que ce n'est pas simplement un esprit qui est devant eux.

La deuxième pêche miraculeuse.

Cet épisode est le rappel, pour les disciples, d’une autre grâce.

Dans le premier récit de pêche miraculeuse (Lc 5.4-11), nous découvrons un Pierre qui ne connait pas encore bien Jésus mais qui lui obéit. La pêche est miraculeuse et le filet se rompt sous le poids des poissons. Il y en a plus que ce que les disciples peuvent supporter. Les barques s’enfoncent sous la masse de cette surabondance.

La réaction de Pierre à la suite du premier miracle est : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis pécheur ! » (Lc 5.8). Ici, après la résurrection, c’est une aube nouvelle. Pierre ne s’exclame plus « éloigne-toi de moi ». Au contraire, il court à la rencontre de Jésus ! Il a compris sa mission, celle d'être vraiment un pêcheur d'hommes et non plus d'errer sur le lac de Galilée à pêcher des poissons dans la nuit.

pêcheur au filet

Malgré le grand nombre de poissons, cette fois-ci le filet ne se déchire pas (v. 11), comme pour dire qu'aucun de ceux qui sont appelés à être « pêchés » ne sera perdu. Le chiffre de cent-cinquante-trois n'a pas de signification particulière (ou alors elle est bien cachée !). Le détail a simplement marqué Jean qui a écrit l'Évangile.

Plus tard, Pierre et lui seront témoins de l’abondance de la pêche quand trois mille personnes se convertiront le même jour (Ac 2.41). Mystère du miracle de Christ qui permet que des personnes s'ajoutent aux croyants par le message des apôtres, et qu'aucun ne se perde ; le filet ne se rompt pas.

Pêcheurs à notre tour.

Pêcheur d'hommes : est-ce là aussi notre mission ? Les douze apôtres ont reçu une mission bien particulière. D'une certaine manière, nous sommes aussi appelés à être ces pêcheurs d'hommes. Aller chercher ceux qui se noient dans la mer de Galilée, ceux qui errent dans la nuit, pour les ramener sur le rivage en plein jour. À ce propos, voici trois remarques pour terminer.

Premièrement, la question de Jésus : « N’avez-vous pas quelque chose à manger ? » Et la réponse des disciples : « Non » (v. 5). C'est lorsque nous nous reconnaissons démunis et pauvres devant Dieu qu'il peut faire de grandes choses. Si souvent, nous pensons être à la hauteur, atteindre les bonnes exigences du chrétien normal. Le Seigneur fera ce reproche à l'Église de Laodicée (Ap 3.17). Sommes-nous parfois tentés de ne pas avouer nos échecs ? De mentir un peu sur nos « fruits » spirituels ? Dieu ne veut pas de chiffres gonflés par les syndicats ou minimisés par la police. Confessons devant lui que « sans lui nous ne pouvons rien faire » (Jn 15.5).

amitié

Deuxièmement, l’œuvre de Jésus : c'est par sa parole que les poissons sont allés se jeter dans le filet. Aucune action des disciples que nous sommes ne peut contraindre les gens à remettre leur vie à Dieu. Même pas un appel prolongé et insistant dans une réunion d'évangélisation.

Nous pouvons aiguiller, montrer l'exemple, prier, mais pas forcer quelqu'un à croire l’Évangile contre son gré !

Finalement, l'action des disciples : pour autant, ceux-ci ne sont pas oisifs. Ils doivent sortir le filet, le tirer dans le bateau, trier les poissons… Voici la tâche qui nous revient : prendre soin de ceux que Dieu a placés dans son Église. Ces nouveaux poissons contribueront à notre joie, nous permettront de nous rapprocher du Maître et de contempler sa gloire. Jésus a demandé : « Apportez-moi quelques-uns de ces poissons. » (v. 10). Et ces poissons rejoignent ceux qui sont déjà auprès de Jésus, venus d'ailleurs. À nous aussi, le Ressuscité fait la même demande aujourd'hui.

Article paru dans :

mars 2021

Rubrique :
À Bible ouverte
Mots-clés :
Point de vue

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